Le Mont Bouquet et le relief du Gard
N.B. Cet article avec ses cartes est tiré intégralement de l’Atlas des Paysages du Languedoc Roussillon : http://paysages.languedoc-roussillon.developpement-durable.gouv.fr/Gard/fondements11.html
« Des paysages précisément délimités par les reliefs, à toutes les échelles
L’organisation des paysages du Gard se comprend fondamentalement et essentiellement par l’observation de ses reliefs. Ceux-ci sont précisément définis, et même contrastés les uns par rapport aux autres, au point qu’ils dessinent presque partout à eux seuls les limites des grands ensembles et des unités de paysage du département.
Les reliefs organisent les grands ensembles paysagers du département.
A l’échelle départementale, les perspectives aériennes de ces reliefs permettent d’identifier immédiatement les pentes Cévenoles, raides et profondément modelées en serres et vallées étroites et successives. A l’amont, elles sont dominées par les hauteurs plus marquées des sommets granitiques (Mont Aigoual et Lingas dans le Gard, Mont Lozère et Bougès en Lozère). On distingue également, toujours dans les hauteurs qui composent le rebord oriental du Massif Central, les étendues aplanies des Causses, découpées par les gorges profondes des rivières. Les pentes Cévenoles, essentiellement schisteuses, s’achèvent brutalement à l’aval sur l’entrelac des plateaux calcaires et des plaines qui font le pays des garrigues.
Ce même pays des garrigues laisse place d’un coup aux étendues des plaines, par un effet de marche dessinée par de longs coteaux continus : plaine de la Costière au pied des garrigues de Nîmes, plaine immense de la Camargue au pied du coteau de Bellegarde/Saint-Gilles, série de falaises et de coteaux dessinant les limites de la vallée du Rhône.
Les reliefs délimitent les unités de paysage
A une échelle plus précise, chaque unité de paysage est presque toujours délimitée par un relief particulier. Ainsi par exemple les nombreuses unités du monde des Garrigues s’organisent en plateaux et plaines, séparés par des coteaux francs et nets parfaitement perceptibles dans le paysage.
Il n’y a guère que les unités de paysage de la Camargue, aux horizons complètement aplanis, dont les limites ne sont pas dictées par les reliefs mais plutôt par des modes de mise en valeur et d’occupation des sols distinctes.
Les reliefs contribuent à composer des sites naturels et des sites bâtis remarquables
A des échelles plus précises encore, les sites naturels sont liés à des reliefs aisément identifiables : des sommets, comme le mont Bouquet, des tables calcaires, comme le plateau de Lussan, des gorges, comme celles du Gardon ou de la Cèze, des petites dépressions nettement incisées dans les plateaux calcaires, comme la plaine de Belvezet. La netteté des reliefs influe largement sur la dimension humaine et culturelle des paysages. Les sites marquants sont presque systématiquement investis par les hommes, composant notamment des sites bâtis remarquables, parfois spectaculaires avec les villes et villages perchés comme Uzès, Villevieille, Vézénobres, Lussan, Castillon-du-Gard, Cornillon, Moussac, etc ; parfois moins spectaculaires mais toujours précisément placés dans l’espace dessiné par les reliefs.
Un territoire de contrastes
Le Gard rassemble finalement des paysages qui peuvent être précisément délimités, où les transitions sont franches, parfaitement perceptibles. Le Gard n’est pas le territoire des fondus-enchaînés, mais tout au contraire celui des ruptures, des contrastes et des surprises, qui contribuent à leur dimension parfois spectaculaire. Il n’y a guère que les pentes Cévenoles qui, insensiblement, nous font passer des ambiances méridionales à l’aval aux ambiances montagnardes à l’amont, dans une progression plutôt douce liée à la modification progressive de la végétation, de l’olivier au hêtre et au sapin en passant par le châtaignier.
Les paysages-gigogne des Garrigues
Les contrastes et les ruptures composent des paysages particulièrement riches et diversifiés lorsqu’ils se succèdent à un rythme serré dans l’espace. Ce n’est pas le cas des vastes étendues de la Camargue, ni peut-être des pentes Cévenoles, dont les vallées sont multiples mais qui offrent au final un paysage assez unitaire et fortement identitaire sur l’ensemble. Mais c’est le cas dans les Garrigues, où les formes de reliefs s’interpénètrent à différentes échelles et démultiplient de ce fait les ambiances contrastées et les sites particuliers ou pittoresques.
Les grands plateaux calcaires des Garrigues peuvent certes paraître monotones en première approche, couverts d’une végétation de garrigue tantôt boisée tantôt broussailleuse. Mais l’alchimie du calcaire, de l’eau et de l’érosion génère bien des particularités. Ainsi ces plateaux s’interrompent brutalement par des coteaux raides qui descendent sur les plaines cultivées et fertiles. Parfois des plaines petites sont même découpées dans les plateaux, comme des pièces de puzzle, formant des sites étonnants et inattendus. A l’intérieur même de ces petites « plaines – surprises », une butte calcaire témoin s’est maintenue, souvent coiffée d’un village. L’emboîtement des reliefs apparaît ainsi tout-à-fait remarquable : on peut l’illustrer par le cas de Lussan, vaste plateau calcaire qui enserre une petite plaine agricole qui elle-même accueille un plateau miniature sur lequel trône le village. Ce phénomène d’imbrication, ou de paysage-gigogne, se retrouve à de multiples reprises dans le département.
Ce sont parfois les plaines qui accueillent les collines, dans une inversion non moins remarquable. La vallée du Vidourle, entre Sauve et Sommières, compose ainsi un véritable dédale de petites plaines et vallons, séparées par les collines coiffées de bois et de garrigues, démultipliant les ambiances, les perspectives et les cadrages. L’Uzège est séparée du bassin d’Alès par ce même jeu de collines, autour de Saint-Maurice-de-Cazevieille, entre Vézénobres et Foissac. »